Dies irae
Défendre est l'unique raison d'être d'un vrai guerrier. Son espoir est positivement proportionnel aux lésions subies et infligées, les brûlures au huitième degré, les yeux crevés, les bras arrachés, les mâchoires en bouillie, les descentes d'organes, les amputations, les enfoncements crâniens. La barbarie est juste, les commotions réparent, c'est la guerre nourricière. Anéantir n'importe quoi plutôt que de ployer, n'importe qui plutôt que de céder au lancinement de ses propres entailles.
Et puis un beau matin, sans qu'un carnage objectivement pire que les précédents ne soit advenu, un murmure, sur le front, C'est fini. Quoi, comment ça, fini, ferme ta gueule, j'ai pas du tout fini moi, et mon foie crevé il est fini aussi, depuis quand t'es une merde toi, espèce de chiottes sèches, vas-y viens, on va les démonter. Un décret a été signé, à partir de dorénavant celui qui n'a pas gagné a perdu mais ça n'a aucune importance parce que vous êtes tous amis, merci pour tout, rentrez bien, prenez soin de vous, soyez heureux.
Il n'y a vraiment que le fond de cuve des bisounours pour croire qu'en tête de front on se bat pour la paix. Le vrai guerrier existe dans la guerre, désire la guerre, jouit dans les bras de la guerre. Tant qu'il détruit, il croit. À son triomphe, ou peut-être même à sa perte, mais chaque jour deux pas en arrière c'est encore marcher. C'est sûrement pour ça que les guerres durent longtemps. Résister, provoquer les coups, la fureur en ambulatoire, la haine en sous-cutané, c'est encore être vivant.
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