Primo Levi, en 1944, est déporté dans un camp de travail, avec d'autres 
hommes qui, après avoir été séparés de leurs familles, sont réduits à être des esclaves sans 
avenir et sans vie propre. Juifs, criminels, marginaux, gens du voyage, 
Grecs, Italiens, Polonais, Français, ils se retrouvent égaux dans le 
fond du fond.
Des travailleurs civils, parqués à part, les cotoient parfois, 
clandestinement ; mais ceux-ci constituent une caste plus "élevée" de 
travailleurs du camp.
"... pour les civils, nous sommes des parias. Plus ou moins 
explicitement, et avec toutes nuances qui vont du mépris à la 
commisération, les civils se disent que, pour avoir été condamnés à une 
telle vie, pour en être réduits à de telles conditions, il faut que nous
 soyons souillés de quelque faute mystérieuse et irréparable. Ils nous 
entendent parler dans toutes sortes de langues qu'ils ne comprennent pas
 et qui leur semblent aussi grotesques que des cris d'animaux. Ils nous 
voient ignoblement asservis, sans cheveux, sans honneur et sans nom, 
chaque jour battus, chaque jour plus abjects, et jamais ils ne voient 
dans nos yeux le moindre signe de rébellion, ou de paix, ou de foi. Ils 
nous connaissent chapardeurs et sournois, boueux, loqueteux et 
faméliques, et, prenant l'effet pour la cause, nous jugent dignes de 
notre abjection. Qui pourrait distinguer nos visages les uns des autres ?
 Pour eux, nous sommes "Kazett", neutre singulier."
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