Du point de vue du croyant, n'est-ce pas blasphémer que de demander à des magistrats qui sont peut-être eux-mêmes des mécréants de condamner d'autres mécréants au nom de Dieu ? N'est-ce pas l'expression d'une sorte de péché d'orgueil que de prendre en charge la défense de Dieu ?
Dieu, le créateur du monde, ce type large d'épaules qui joue avec notre planète comme l'automobiliste arrêté au feu rouge joue avec ses crottes de nez, a-t-il besoin de maître Tartempion pour laver son honneur ? En attaquant en justice les blasphémateurs, les associations communautaristes ne prouvent qu'une chose : elles ne croient pas en Dieu.
Ou alors elles sont pour la double peine, ce qui est particulièrement méchant et pervers. Elles veulent que nous soyons condamnés ici, en France, et une seconde fois là-haut.
lundi 24 avril 2017
samedi 8 avril 2017
Vivre et penser comme des porcs - Gilles Châtelet
[comment, dans les années Mitterrand, après les années 60 et 70 — et une certaine libération des idées, des mœurs, des modes de vie — la population a été mise à la disposition des "démocraties-marchés"]
L’heure allait bientôt sonner de remettre les pendules à l’heure ! Il faudrait moins de trois ans pour dissiper le charme et assurer le triomphe des années 80, écœurantes d’ennui, de cupidité et de bêtise, années des «révolutions conservatrices» néolibérales, années cyniques de Reagan ou de Thatcher… et de l’hypocrite trivialité de l’ère Mitterrand, années de la contre-attaque planétaire des imbéciles ulcérés par l’arc-en-ciel de générosité et de liberté entrouvert pendant quinze ans. L’heure serait désormais celle de la Main invisible du marché, qui ne prend pas de gants pour affamer et broyer sans bruit, invincible parce que faisant pression partout et nulle part, mais qui pourtant, comme Dieu a besoin des hommes, avait besoin d’une voix. Elle était toute désignée. La Contre-Réforme néolibérale, mercenaire zélé, allait offrir les services classiques de l’option réactionnaire, ceux d’une alchimie sociale capable de transformer en force politique ce qui finit toujours par exsuder des classes moyennes : crainte, envie et conformisme.
L’heure allait bientôt sonner de remettre les pendules à l’heure ! Il faudrait moins de trois ans pour dissiper le charme et assurer le triomphe des années 80, écœurantes d’ennui, de cupidité et de bêtise, années des «révolutions conservatrices» néolibérales, années cyniques de Reagan ou de Thatcher… et de l’hypocrite trivialité de l’ère Mitterrand, années de la contre-attaque planétaire des imbéciles ulcérés par l’arc-en-ciel de générosité et de liberté entrouvert pendant quinze ans. L’heure serait désormais celle de la Main invisible du marché, qui ne prend pas de gants pour affamer et broyer sans bruit, invincible parce que faisant pression partout et nulle part, mais qui pourtant, comme Dieu a besoin des hommes, avait besoin d’une voix. Elle était toute désignée. La Contre-Réforme néolibérale, mercenaire zélé, allait offrir les services classiques de l’option réactionnaire, ceux d’une alchimie sociale capable de transformer en force politique ce qui finit toujours par exsuder des classes moyennes : crainte, envie et conformisme.
Vivre et penser comme des porcs.
De l'incitation à l'envie et à l'ennui dans les démocraties-marchés.
Exils, 1998
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