Le principal outil de contrôle de l’Afrique reste cependant le dispositif militaire français. Et quel dispositif ! Plus de 10 000 militaires français sont actuellement déployés en Afrique. Près de la moitié appartient aux forces prépositionnées, réparties sur trois bases permanentes : 2900 soldats à Djibouti (contrôle de la mer Rouge), 1150 au Sénégal (base maritime) et 800 au Gabon (plateforme aérienne des opération françaises en Afrique). Les autres militaires participent à des « opération extérieures » (Opex). Les principales sont l’opération Licorne en Côte d’Ivoire (2400 soldats, depuis 2002), l’opération Epervier au Tchad (1200 militaires, depuis 1986) — ces deux dernières opérations sont en passe de devenir des bases permanentes, compte-tenu de leurs durées —, l’opération Eufor, force européenne au Tchad et en République centrafricaine (450 soldats en 2007, bientôt 2100, certains ayant le double statut Epervier/Eufor), et enfin l’opération Boali en République centrafricaine (400). Ce dispositif est complété par le Commandement des Opérations Spéciales (COS). Créé en 1992, il s’agit des forces spéciales, constituées d’un réservoir de 3000 hommes choisis parmi les troupes d’élites, dotés d’équipements ultra-modernes, dépendant directement de l’Elysée et capables d’interventions sur toute la planète.
mercredi 30 novembre 2011
lundi 28 novembre 2011
Le président des riches - Michel Pinçon & Monique Pinçon-Charlot
5. Nicolas Sarkozy, avocat d'affaires - le droit comme propédeutique à la politique
Le droit et la politique ont partie liée depuis longtemps. Le pouvoir est exécutif et législatif. Il applique les lois, les crée ou les modifie.
Les classes populaires et, dans une moindre mesure, les classes moyennes n’ont d’accès à la chose juridique que dans une situation contrainte. Le citoyen ordinaire n’a à connaître les méandres du droit qu’en tant que victime ou coupable. À l’inverse, les personnes issues de milieux favorisés ont accès dès leur enfance à une culture juridique inhérente à leur classe sociale. Les affaires et le patrimoine ne vont pas sans problèmes qui trouvent leur solution devant les tribunaux de commerce ou au civil. Il y a toujours quelque question fiscale ou immobilière qui réclame l’intervention de conseillers, souvent un notaire, ami de la famille. Les études de droit, ou d’économie, renforcent les premières approches offertes par le milieu familial. La loi est une forme d’existence des relations entre les classes : les avantages acquis de la haute société sont protégés par elle. La loi exprime donc un rapport de forces à un moment donné : la fixation par le droit du travail de la durée légale du temps de travail le dit clairement.
La maîtrise du droit est très inégalement répartie. Presque nulle en milieu populaire, elle est un facteur d’accès beaucoup plus aisé à la politique pour les jeunes bourgeois. Études de droit et goût du pouvoir mêlés donnent les bases des grandes ambitions politiques. Mais ce goût du pouvoir, d’où peut-il venir ?
Le goût du pouvoir n’est pas inné, il se construit dans un environnement et au fil d’une histoire familiale et sociale. Il est constitutif de l’éducation des enfants des classes dominantes. Le père et, de plus en plus souvent, la mère occupent des positions d’autorité dans la société, d’un point de vue professionnel mais aussi par la possession d’un patrimoine important. La puissance omniprésente est redoublée par des cadres de vie qui symbolisent, par l’ampleur des espaces et la richesse décorative, la supériorité et la démesure. Les tâches domestiques sont déléguées, ce qui introduit des relations de pouvoir sur autrui jusque dans l’intimité du domicile familial. Élevés dans un univers où les profits matériels et symboliques vont de soi, les enfants des classes supérieures sont construits de façon à aspirer aux mêmes avantages pour leur âge adulte.
Le goût du pouvoir est inculqué par la famille, mais aussi par l’école et les rallyes, ces groupes de jeunes issus du même milieu social favorisé et choisis par les mères pour organiser collectivement les loisirs de leurs enfants. L’envie de l’autorité doit être comme celle de la lecture ou de la musique, une satisfaction, un plaisir, une réalisation du plus intime de soi-même, une seconde nature. Sans cette intériorisation profonde des droits et des devoirs que lui donne sa position dominante, le grand bourgeois pourrait vivre nombre de contraintes, telles que celles des mondanités, comme du temps perdu dans un ennui profond.
Habitant à Neuilly, fréquentant les écoles de la grande bourgeoisie, tout en se situant aux franges les moins favorisées de cette classe, Nicolas Sarkozy avait toutes les chances de développer un goût du pouvoir hypertrophié. Il s’agit peut-être pour lui d’assurer une continuité avec ses origines, mais aussi de prendre sa revanche sur ses camarades de classe plus favorisés que lui par la fortune. Ayant été trop souvent le second, il rêvait d’être enfin le premier.
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