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Lorsqu’on utilise le terme de “bœuf” pour parler d’un esclave, ou “agnelle” pour parler d’une domestique, cela donne un meilleur accès à l’imaginaire racial pratique derrière ces termes. Nous apprenons, par cette “boeufisation” ou cette “agnellisation”, ce qu’il est souhaitable, possible et préférable de faire avec ces personnes. Aussi nous savons ce qu’un raciste veut faire lorsqu’il associe un juif à un “serpent” ou à un “virus”. L’action qui en découle est plus claire que lorsqu’on déclare quelqu’un “inférieur”. La métaphore animale n’est pas qu’une “catégorie raciste d’observation”, c’est une déclaration d’intention.
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Les animaux (et parfois les plantes), tels que classifiés et imaginés dans le processus de domestication de la nature, sont depuis longtemps une source de métaphores décrivant les peuples subjugués et infériorisés […]. Les personnes qui cherchent à dominer racialement ou sexuellement intègrent des catégories animales dans leurs techniques de domination.
Le Loup et le musulman. Le racisme est-il une menace écologique ? - Ghassan HAGE, ed. Wildproject, 2017